Le dire et pourtant
Je vais. De par la phrase, à travers la signification, chercher ailleurs ce que je suis, à quelques pas seulement, si près que je pourrais toucher ce que je cherche. Mais cela reste inaccessible, on ne s’atteint jamais. Je le sais, le respecte, l’honore et l’entends. J’avance avec conscience et mes pierres en main, mes racines, mon cœur. Je me tiens toute entière dans ce que je bâtis, même quand je me tourne le dos. Je suis mon fil dénoué, longeant la phrase, reniant le style, perdue dans la signification. J’avance, de phrase en phrase, pas à pas, posant les pierres une à une, vers la chute, vers l’édification. On ne sait pas bien ce qu’on touche, on ne sait pas ce que l’on atteint. On reste dans le noir, au début de la phrase, avec en mains les outils, la volonté d’y aller. On ne sait pas où l’on tombe, ce que les autres voient. La seule chose que l’on sait c’est que c’est là, monté, et qu’on est arrivé au terme du voyage.